28 octobre 2020 - 14:55
L’opinion des élus
Par: Vincent Guilbault

Vincent Guilbault

Dans une discussion avec un homme intéressé par la politique municipale, nous avons abordé l’intervention de Réginald Gagnon sur le dossier du golf. J’étais en partie d’accord avec mon interlocuteur, qui mentionnait que l’élu n’aurait pas dû commenter. Mais depuis notre discussion, plus j’y pense, plus mon opinion bouge.

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Pour la petite histoire, Réginald Gagnon est ce conseiller municipal de Belœil qui a déposé un mémoire pour proposer une quatrième option pour l’avenir du golf. Il partait de la prémisse que les propositions sur la table étaient plus ou moins vouées à l’échec.
Là où le bât blesse, c’est que la Ville a promis d’afficher une position de neutralité dans le débat. En dévoilant un mémoire et en accordant une entrevue sur le sujet à notre journaliste, M. Gagnon a « brisé » cette promesse de neutralité, même s’il dit agir à titre de citoyen.
Ajoutons aussi que M. Gagnon est président du Comité consultatif d’urbanisme (CCU). Quelques voix y ont vu une forme d’apparence de conflit d’intérêts.
D’accord, je peux comprendre. Mais je ne suis pas d’accord.
Le 3 septembre, je signais l’éditorial La même opacité, un texte très commenté par notre lectorat. J’y faisais le constat d’une démocratie municipale difficile à comprendre. Je me cite : « Tout est décidé en comité plénier (ou caucus) et le public n’a pas accès au débat. Il ne sait jamais vraiment ce que pense un élu d’une décision prise derrière des portes closes. Devant le public, tout se fait de façon unanime. En fait, la séance publique ressemble plus à une danse chorégraphiée où les élus adoptent ou appuient des résolutions un peu au hasard, en attendant leur tour pour lever la main. »
Quelques jours plus tard, le conseiller municipal d’Otterburn Park Jacques Portelance me contacte pour m’indiquer tout le bien qu’il pense de mon opinion; opinion qu’il partage aussi. Il a justement signé une lettre avec une quarantaine d’élus municipaux du Québec, dont Emile Grenon Gilbert, de Mont-Saint-Hiliare. Dans la lettre Pour des villes plus transparentes, publiée le 25 septembre, les coauteurs demandent une plus grande transparence. Moins de portes closes, plus de débat en public. Nous avons publié une entrevue avec les deux hommes dans notre dernière livraison.
Il m’est donc difficile de condamner le geste de M. Gagnon, car son geste reflète exactement ce que devrait être le rôle d’un élu municipal : dire tout haut son opinion, surtout une opinion discordante. On ne veut pas des votes chorégraphiés; nous voulons savoir ce que pense chacun des décideurs des décisions.
Deux choses pour terminer. D’abord, nous parlons de la neutralité de la Ville et des élus dans le dossier du golf. « Neutralité » n’est pas le mot juste. Nous devrions parler d’une position d’écoute, car les élus et les fonctionnaires veulent se faire une tête en sondant la population, un geste des plus nobles. Mais à la fin, c’est la Ville qui décidera du projet qui sera présenté aux citoyens.
Aussi, M. Gagnon n’est ni un administrateur ni un fonctionnaire. Il n’est pas élu pour administrer la Ville, il est élu pour décider. Et je veux connaître sa position dans le débat, comme celle de ses collègues.
Ça m’amène au deuxième point. Je veux connaître sa position, car si les gens qui ont un point de vue éclairé sur le dossier ne se prononcent pas, et bien d’autres le feront, souvent sans gêne. Et ce n’est pas toujours les plus éclairés qui prendront le micro.

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