30 juillet 2020 - 17:36
Vitesse et sécurité
Par: Vincent Guilbault
Vincent Guilbault

Vincent Guilbault

Nous avons appris la semaine dernière que Belœil allait finalement abaisser la vitesse à 40 km/h dans toutes les rues résidentielles de son territoire. Une décision aussi simple peut sembler aller de soi. C’est pourtant plus complexe.

Publicité
Activer le son

D’abord, vos réactions sur notre page Facebook montrent que vous n’êtes pas tous du même avis. Certains semblent trouver l’idée géniale et espèrent que les conducteurs lèveront le pied dans les quartiers résidentiels. D’autres croient que la mesure se traduira principalement pas un sentiment de fausse sécurité.
La vérité, elle, se trouve quelque part au milieu de tout ça.
Le ministère des Transports a publié en 2015 le guide Gestion de la vitesse sur le réseau routier municipal en milieu urbain, un document à l’intention des municipalités qui voulaient connaître l’impact de mesure comme la réduction de la vitesse dans leurs rues.
Nous savons tous que la vitesse tue; je ne veux pas m’éterniser sur la question. Mais il est bon de mentionner que la vitesse ne tue pas seulement à très haute vitesse ou à plus de 100 km/h. Les différences sont très notables même à basse vitesse.
En milieu urbain, les chiffres montrent que de faibles réductions de vitesse peuvent avoir un effet significatif sur la gravité des blessures résultant de collisions. Entre rouler 40 km/h et rouler 60 km/h, la différence impacte réellement le champ de vision du conducteur. Cette « différence notable » selon le MTQ peut faire la différence entre voir ou non un enfant traverser la rue.
Aussi, plus la vitesse augmente, plus les distances de visibilité d’arrêt augmentent. Le conducteur d’une voiture circulant à 30 km/h aura besoin de 30 mètres pour s’arrêter. À 40 km/h, il aura besoin de 45 m. À 50 km/h, il aura besoin de 62 m; le double qu’à 30 km/h! C’est énorme sur une rue résidentielle.
Finalement, lorsque la vitesse d’impact entre un piéton et une voiture dans une collision est de 30 km/h, la probabilité du décès d’un piéton est de l’ordre de 10 % ; à 50 km/h, elle dépasse les 75 %. Encore une fois, cette différence de 20 km/h agit en facteur multiplicateur.
Donc, une réduction de la limite de vitesse à 40 km/h devrait se traduire par moins d’accidents ou par des accidents moins graves? Oui et non. Oui, si nous respectons la signalisation. Sauf que le respect de la signalisation par les automobilistes n’est pas automatique si la réduction n’est pas accompagnée par d’autres mesures. Si par exemple, un conducteur ne craint pas de se faire intercepter, il ne sera pas poussé à modifier son comportement. Selon un sondage cité dans l’étude, la proportion des conducteurs qui perçoivent le risque d’être interceptés pour excès de vitesse comme étant très faibles ou relativement faibles, dans une zone où la limite de vitesse est de 40 km/h ou de 50 km/h, est de 80 %. Donc, la peur n’est pas au rendez-vous.
Dans ce sondage commandé par la société de transports, près de 65 % des résidents des rues dont la limite de vitesse est de 40 km/h disent dépasser la limite fixée.
Selon le MTQ, « des relevés réalisés avant et après une modification de la limite de vitesse en milieu urbain ont mesuré que si aucune autre mesure, que ce soit un aménagement ou un contrôle policier, ne s’ajoute au changement du panneau de limite de vitesse, les vitesses pratiquées ne changent pas de façon significative. »
Qu’est-ce qu’il faut en comprendre? Que la réduction de la limite de vitesse n’est pas une fin, mais un début. Il faut donc féliciter le geste de Belœil. Mais il faut s’attendre à d’autres mesures à court terme.

image