7 novembre 2018 - 12:49
Une nouvelle tradition commence à l’épicerie de Saint-Jean-Baptiste
Par: Denis Bélanger

Guylaine Gendron entourée de ses enfants Rosalie, Camille et Bruno-Pierre Vincent. Photo: Yann Canno

Jean-Marie Vincent dans son épicerie. Photo: Gracieuseté

Jean-Marie Vincent. Photo: Gracieuseté

Un jeune Bruno Vincent. Photo: Gracieuseté

Guylaine Gendron en compagnie de son conjoint et de deux de ses jeunes enfants il y a plusieurs années. Photo: Gracieuseté

Bruno Vincent devant le marché Tradition. Photo: Archives

Une page d’histoire vient d’être tournée dans la petite municipalité de Saint-Jean-Baptiste. L’épicerie Marchés Tradition vient de changer de propriétaire et sera dirigée dorénavant par une nouvelle famille. Les Vincent garnissaient les tables des Jean-Baptistois depuis 62 ans.

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Né à Saint-Jean-Baptiste dans les années 1930, Jean-Marie Vincent, avec sa femme, a acheté en 1956 le magasin général de Jean-Paul Desnoyers, qui allait être transformé par la suite en dépanneur. M. Vincent était déjà bien connu de la communauté; il avait pétri le pain pendant plusieurs années et effectué la livraison aux portes de son patelin. En 1987, le patriarche de la famille Vincent a cédé les rênes de son commerce à son fils Bruno et sa conjointe Guylaine Gendron.

Bruno Vincent est toutefois décédé le 7 décembre 2013 à la suite d’un accident de voiture survenu à l’intersection du rang des Trente et de la route de Rougemont. M. Vincent conduisait la voiture de son ami Claude Bédard, qui a également perdu la vie. Quelques mois avant l’accident, l’épicier avait décidé de s’affilier avec Sobeys, l’entreprise exploitant la bannière IGA. Auparavant, l’épicerie de Saint-Jean-Baptiste était associée à Métro.

Tenir le fort
À la suite du décès de son époux, Guylaine Gendron a continué d’opérer l’épicerie avec le soutien des employés et de sa famille. «La première année a été difficile», reconnaît la mère de famille.
Au fil des années la fatigue se faisait sentir et la rentabilité devenait de plus en plus difficile. Bien qu’elle n’avait pas fait d’annonce formelle, elle avait laissé savoir à Sobeys qu’elle voulait vendre son commerce si l’offre était bonne. Ses trois enfants, Rosalie, Camille et Bruno-Pierre, n’avaient pas comme projets de carrière d’opérer une épicerie.

Daniel Deblois, de Bromont, a frappé à la porte de Guylaine Gendron le printemps dernier et celle-ci a accepté une offre à l’automne. «Une opportunité qui s’est présentée. Je me suis dit qu’une pareille occasion ne se représenterait peut-être pas. C’était important pour nous de vendre à quelqu’un qui voulait poursuivre l’épicerie.»

Quand Guylaine Gendron a pris la décision de vendre, elle s’est fait un devoir d’en informer sa belle-famille. «Ce n’est pas une triste nouvelle, souligne Manon Vincent, la sœur de Bruno. Ça termine bien la boucle. Guylaine Gendron aura poursuivi le rêve de mon frère pendant plusieurs années.»

Mme Gendron a remis les clés de son entreprise avec un grand pincement au cœur et elle admet que les clients lui manqueront beaucoup. Elle ignore pour l’instant quels seront ses projets, mais elle demeurera à Saint-Jean-Baptiste et elle a bien l’intention de continuer à y faire son épicerie. «Le contact avec la clientèle va me manquer. On était au courant des confidences des gens. Les employés vont aussi me manquer. J’aimerais d’ailleurs remercier la clientèle et les employés de nous avoir supportés.»

La vente du commerce n’a pas laissé indifférents les enfants de Guylaine Gendron, qui avaient adopté l’épicerie comme deuxième maison. «C’est une autre partie de papa qu’on va laisser partir. Il y avait un gros sentiment d’appartenance», souligne Bruno-Pierre Vincent.

«Mon père a travaillé fort, mais les cinq dernières années, ma mère a travaillé très fort. Elle a porté plusieurs chapeaux à fois, que ce soit celui de gérant ou de patron. En tant que mère, elle nous a supportés dans toutes nos épreuves. Son travail mérite d’être souligné», louange de son côté Camille Vincent.

Le nom Vincent gravé pour toujours
La réputation des Vincent est solidement ancrée dans la communauté. Plusieurs parlent encore de Jean-Marie Vincent, dont les diverses histoires témoignent d’un homme généreux. La mairesse de Saint-Jean-Baptiste, Maryline Nadeau, se souvient que, lorsqu’elle était gamine, M. Vincent recevait les jeunes avec de la gomme et des ballounes.

«Ça fait 50 ans que la famille Nadeau s’est établie dans la région, Jean-Marie a été le premier qui a tendu la main à mes parents et aux autres nouveaux arrivants», rappelle la mairesse.
Selon Manon Vincent, son père n’aura jamais perdu d’argent, même s’il faisait crédit à des clients. «Il y avait un monsieur qui avait une grosse famille de dix enfants. L’hiver, il buchait du bois. L’automne, avant de partir, il venait voir mon père pour lui dire que sa femme allait faire l’épicerie et qu’il lui paierait à son retour. Cet homme, quand il revenait au printemps, allait directement payer mon père avant d’aller chez lui.»

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