28 février 2020 - 07:50
Débordements d’eaux usées dans la rivière
Belœil réfléchit à des mesures pour éviter une augmentation des surverses
Par: Sarah-Eve Charland

Le poste de pompage Bernard-Pilon, bien qu’il ne soit pas considéré dans le plan de gestion de débordements, est à l’origine de plusieurs débordements d’eaux usées, selon Fondation Rivières. Photo François Larivière | L’Œil Régional ©

Le plan de gestion des débordements de la Ville de Belœil, qui vise à réduire le nombre de débordements d’eaux usées dans la rivière Richelieu, est toujours en attente d’une approbation du ministère de l’Environnement et de la Lutte contre les changements climatiques (MELCC). La Ville pourrait devoir investir au minimum 2 250 000 $ afin de seulement maintenir le statu quo du nombre de débordements autorisés par année.

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Le plan de gestion des débordements présente trois scénarios qui décrivent les effets des différents développements immobiliers sur les ouvrages de surverse. Chaque scénario visualise le problème d’un angle différent, en fonction des développements connus en 2014, des développements connus en octobre 2019 et en fonction d’objectifs environnementaux élevés. Ces scénarios décrivent les actions à mettre en place afin d’atteindre les exigences du ministère qui établissent le nombre de surverses maximales par poste de pompage. À Belœil, on retrouve neuf ouvrages de surverse.

Les exigences du Ministère ne prennent pas en compte le volume d’eaux usées déversées, mais seulement la fréquence des surverses. « La méthode qui collecte les données constitue un moyen simple, fiable et économique d’évaluer la performance d’un ouvrage de surverse », affirme le Ministère sur son site Internet. L’évaluation des volumes d’eaux usées débordés nécessite un appareillage plus sophistiqué et peut s’avérer complexe. L’estimation des volumes n’apparaît pas essentielle, peut-on y lire.

Pour l’instant, la position ministérielle ne vise qu’à éviter l’augmentation des débordements, mentionne la porte-parole de la Ville de Belœil, Caroline Nguyen Minh. Parmi les trois scénarios, la Ville envisage donc le deuxième scénario. Ce scénario vise à créer un bassin de rétention afin de respecter les exigences du ministère en fonction des développements connus entre 2014 et la date de publication du document (31 octobre 2019).« Les mesures compensatoires décrites au scénario 2 seraient donc suffisantes pour l’instant et devront être réalisées dans un horizon de cinq ans, et ce, à la suite de l’approbation du plan par le MELCC. Par contre, dans un désir d’être proactif dans ce dossier, et sachant qu’il y a beaucoup à faire, certaines mesures décrites au scénario 3 sont déjà intégrées au plan 10 ans de la Ville », poursuit Mme Nguyen Minh.

Les scénarios

Dans ce deuxième scénario, les exigences du Ministère ne sont pas respectées à un des neuf ouvrages de surverse. Advenant la réalisation de l’action suggérée, la ville connaîtrait 67 débordements sur une base annuelle pour un total de 167 529 m3 en eaux usées déversées, selon une simulation. Cette action, qui consiste à créer un bassin de rétention à l’abord de la station de pompage Rive-Ouest avec une conduite de raccordement, pourrait représenter un investissement de 2 250 000 $.

Le premier scénario englobe les actions à mettre en place selon les développements connus seulement en 2014. La Ville n’écarte pas fermement les actions décrites dans ce scénario, mais n’est pas en mesure d’établir quelles seront les interventions.

Pour être plus proactive en matière environnementale, la Ville pourrait favoriser les actions du troisième scénario. Ce dernier prend en compte les développements futurs tout en respectant les objectifs du Ministère. Les objectifs représentent un idéal souhaitable pour protéger le milieu. Pour environ 70 % des ouvrages de surverse de la ville, l’objectif est plus restrictif que l’exigence en matière de fréquence de débordement, selon Belœil. Dans le cadre de ce scénario, il serait nécessaire de mettre en place des mesures pour l’ensemble des neuf ouvrages de surverse analysés dans le plan de gestion des débordements. Si la Ville envisage cette option, le nombre de surverses diminuerait à 51 par année pour un total de 114 321 m3 en eaux usées. Le budget de ces actions est évalué à 21 915 000 $.

En attente

Le plan de gestion des débordements a été déposé auprès du MELCC en novembre 2018. La Ville a reçu quelques commentaires et a dû déposer une nouvelle version du document en décembre 2019. La Ville prévoit recevoir d’autres commentaires du Ministère plus tard au printemps.

Une fois le plan de gestion des débordements approuvé par le Ministère, la Ville pourrait avoir accès à des subventions, ajoute Mme Nguyen Minh. Des études de faisabilité devront être réalisées aussi pour chacune des interventions retenues.

Depuis le 1er avril 2014, le Ministère assure qu’il n’autorisera aucun projet d’extension de réseau d’égout susceptible de faire augmenter la fréquence des débordements d’égouts sanitaires ou domestiques sans mesures compensatoires.

Des actions rapides, souhaite Fondation Rivières

Le président de Fondation Rivières, Alain Saladzius, se réjouit que la Ville de Belœil ait fait l’exercice d’identifier les points faibles de son réseau. « Les travaux recommandés par le rapport, on souhaite qu’ils soient réalisés le plus rapidement possible. […] Les municipalités devraient être tenues d’effectuer les augmentations de capacité [du réseau d’égout] avant même de se développer ou le faire en même temps, mais ne devraient pas attendre à plus tard pour corriger la situation. »

Il salue les recommandations de la firme dans le plan d’action, dont la création d’un bassin de rétention. « C’est une bonne idée. »

D’un autre côté, il se questionne sur les limites de l’analyse. Le plan d’action ne prend pas en considération le poste de pompage sur la rue Bernard-Pilon. Fondation Rivières estime que ce poste de pompage devrait être l’une des priorités de la Ville de Belœil.

« C’est un poste de pompage qui déborde beaucoup et il n’est pas dans l’étude. On localise un problème important à ce poste de pompage. […] Le poste est en tête du réseau. Toutes ces eaux-là cheminent dans le secteur qui longe la rivière. Si on réduit les débordements en amont, […] ça peut affecter les capacités du secteur et toute l’étude. C’est important de faire des études globales. »

La Ville explique l’absence de ce poste de pompage dans ce document parce qu’elle s’est concentrée sur le bassin de drainage qui encaissera les effets des développements projetés et des développements à compenser. Les mesures de compensation seront appliquées à l’intérieur de ce bassin.

L’organisation dénonce aussi que les exigences du Ministère n’aient comme seul objectif de maintenir le nombre de débordements sans viser une diminution. « Les exigences sont fixées pour ne pas aggraver la situation. Nous, on préconise de viser les objectifs environnementaux. En fait, on devrait viser aucun débordement dans un monde idéal », conclut M. Saladzius.

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